Deux années après le déclenchement du conflit en Ukraine, rien ne semble devoir dissuader le président Vladimir Poutine d’affirmer son ambition de toute-puissance. Alors que son armée vient de reconquérir Avdiivka, bravant la défense héroïque des Ukrainiens, la question persiste : jusqu'où ira le président russe, insensible aux ravages causés par ses desseins? Deux ans se sont écoulés depuis le début de la prétendue "opération militaire spéciale", une initiative qui se donnait pour objectif de mettre fin à la guerre dans le Donbass, de sécuriser la Russie, et de "dénazifier" l'Ukraine. Pourtant, aucune force ne semble ébranler sa détermination à asseoir son emprise totale.
Ces deux années de conflit en Ukraine ont laissé dans leur sillage des cicatrices profondes et un bilan humain difficile à appréhender. La question des pertes, qu'elles soient du côté russe ou ukrainien, demeure un sujet délicat et épineux. Les récents chiffres avancés, bien que sujets à spéculation, fournissent un aperçu partiel de l'ampleur des ravages causés par cette guerre.
Le décompte des pertes civiles, bien que difficile à établir de manière précise, soulève des préoccupations quant à la réalité du nombre de victimes. Les Nations Unies, évoquant un "tournant historique" en novembre dernier, ont avancé le chiffre de 10 000 morts, tout en suggérant que les pertes civiles réelles, concentrées principalement du côté ukrainien, pourraient être considérablement plus élevées. Des estimations indiquent que le nombre de civils décédés pourrait avoisiner les 50 000, une sombre réalité enracinée dans l'occupation de certaines zones ukrainiennes par les forces russes.
Quant aux pertes du côté militaire, les chiffres officiels des états-majors russe et ukrainien demeurent rares, alimentant les spéculations sur l'ampleur réelle de la tragédie. Les données fournies par les belligérants se concentrent principalement sur les pertes infligées à l'ennemi. Selon les déclarations récentes, l'armée ukrainienne aurait tué ou blessé plus de 392 000 soldats russes au cours des deux dernières années, tandis que le ministre russe de la Défense évoque 383 000 militaires ukrainiens dans la même période. Bien que ces chiffres soient soumis à caution, les estimations de spécialistes suggèrent qu'environ 100 000 soldats pourraient avoir perdu la vie dans chaque camp.
Épopée Russo-Ukrainienne :
L'histoire tourmentée entre la Russie et l'Ukraine s'entremêle avec les racines profondes de la Rous de Kiev, fondée par des Vikings en 864. Durant cinq siècles, ce territoire prospère s'étend de la mer Noire jusqu'à l'actuelle Finlande, suscitant la convoitise d'autres nations. Au 13e siècle, la Rous de Kiev implose, succombant tour à tour aux Mongols, au grand-duché de Lituanie, à la Moscovie, puis à une alliance complexe avec le grand-duché de Lituanie et le royaume de Pologne jusqu'en 1648.
Cette année-là, les Cosaques, guerriers semi-nomades d'Ukraine centrale, résistent farouchement à l'occupation polonaise, fondant leur État, l'Hetmanat cosaque, avec un esprit combatif et une autogestion remarquable. Toutefois, leur alliance avec l'Empire russe, scellée par le traité de Pereïaslav, devient un lourd tribut à payer, amorçant l'absorption de l'Ukraine par l'Empire russe au 17e siècle.
L'histoire ukrainienne endure ensuite des décennies de lutte pour préserver sa culture, illustrée par les interdictions de la langue ukrainienne au 19e siècle, la résistance face à la collectivisation stalinienne, et la tragique famine de 1932-1933. Après la Seconde Guerre mondiale, l'Ukraine obtient un siège à l'ONU, mais la catastrophe de Tchernobyl en 1986 jette une ombre sur les espoirs de démocratisation sous l'URSS.
La chute de l'URSS en 1991 ouvre une nouvelle ère d'indépendance pour l'Ukraine, qui reste proche de la Russie malgré les soubresauts politiques. Les années 1990 et 2014, marquées par des manifestations massives à Maïdan, révèlent la quête ardente des Ukrainiens pour une identité indépendante. L'annexion de la Crimée en 2014 et le soutien aux séparatistes pro-russes consomment la rupture entre Moscou et Kiev, jetant une lumière crue sur cette chronique tumultueuse qui résonne à travers les siècles.
L'ère soviétique : Culture commune et domination russe
La relation entre l'URSS et l'Ukraine a été complexe. L'URSS a oscillé entre la valorisation de l'identité ukrainienne et son oppression, notamment pendant l'Holodomor, une famine artificielle dans les années 1930 qui a entraîné la mort de plusieurs millions d'Ukrainiens. Pendant la Seconde Guerre mondiale, certaines régions ont collaboré avec les nazis, suscitant des questions sur les motivations, allant de la lutte contre l'occupant soviétique à une adhésion à l'idéologie nazie.
Après la guerre, une culture soviétique commune a émergé, mais la langue ukrainienne a été progressivement opprimée au profit du russe. La relation entre Moscou et l'Ukraine oscillait entre fraternité et inégalité perçue, avec un lien considéré comme intrinsèque mais hiérarchisé.
En 1954, Khrouchtchev a offert la Crimée à l'Ukraine, suscitant des débats sur les motivations réelles. L'éclatement de l'URSS en 1991 a marqué le début d'une période où l'Ukraine a maintenu des liens avec la Russie tout en explorant des relations occidentales.
Guerre de 2014 à 2022 : Une évolution de la vision ukrainienne:
La vie politique ukrainienne a été marquée par un mouvement de balancier entre l'est et l'ouest, symbolisant des projets divergents. En 2014, l'annexion de la Crimée par la Russie a déclenché des manifestations anti-Kremlin à Maïdan, illustrant le rejet des aspirations pro-européennes par le président Ianoukovitch.
La période entre 2014 et 2022 a été caractérisée par une guerre, bien que l'État russe la nie. Cette période a cristallisé le rejet de la Russie et renforcé les positions pro-européennes chez les Ukrainiens, considérant l'Europe comme un garant plus sûr de leur souveraineté.
Entre 2014 et 2019, au moins 13 000 personnes ont perdu la vie dans l'est de l'Ukraine, et la Crimée a été annexée par la Russie. La relation entre la Russie et l'Occident, depuis la fin de la guerre froide, n'a jamais été aussi tendue. L'histoire commence par l'importance de l'Ukraine pour les Russes, en tant que berceau de la civilisation de la Rus' de Kiev.
La Crimée devient le centre d'une tension croissante entre la Russie et l'Ukraine, exacerbée par un référendum contesté où le rattachement à la Russie l'emporte massivement. Deux raisons principales expliquent l'importance stratégique de l'Ukraine pour la Russie : l'accès à la mer chaude, notamment à travers la mer Noire, et la préservation d'une zone tampon d'influence à l'ouest.
Les relations entre la Russie et l'Occident se détériorent après la fin de la guerre froide, malgré des espoirs initiaux de coopération. Des promesses implicites de l'OTAN de ne pas s'étendre vers l'Est sont contestées, et des pays de l'ancien bloc de l'Est rejoignent l'OTAN, suscitant la méfiance russe.
La Russie se tourne alors vers l'Est, renforçant ses liens avec la Chine, devenue son principal partenaire commercial. L'Union européenne impose des sanctions à la Russie après le conflit en Ukraine, poussant la Russie à diversifier ses partenaires commerciaux, notamment avec la Chine.
Le gaz russe devient un enjeu majeur, avec un contrat de 400 milliards de dollars signé entre la Russie et la Chine en 2014. Les relations diplomatiques entre la Russie et la Chine se renforcent, partageant une opposition commune à l'influence américaine.
La Russie cherche à jouer un rôle central dans l'Eurasie, créant l'Union économique eurasiatique en 2015. Les « nouvelles routes de la soie » chinoises renforcent la coopération entre la Russie et la Chine, suscitant l'attention géopolitique sur l'Eurasie.
De l'Invasion de 2022 jusqu'à present:
L'invasion de l'Ukraine en 2022 a été précédée par des avertissements publics du gouvernement américain entre mi-janvier et mi-février. Ces alertes détaillaient la possibilité d'une attaque imminente par la Russie, envisageant des bombardements aériens, des tirs de missiles et même un assaut rapide. Les renseignements américains anticipaient une attaque lorsque les conditions météorologiques seraient favorables aux Russes. Malgré ces avertissements, les Européens et même l'Ukraine exprimaient du scepticisme quant à une résolution militaire, privilégiant la voie diplomatique. La Russie a finalement lancé l'invasion le 24 février 2022 depuis la Russie, la Biélorussie et les territoires ukrainiens occupés depuis 2014, entraînant un conflit majeur.
Avec l'aube de 2024, un nouveau défi herculéen se profile devant l'Ukraine. Les républicains, dirigés par Donald Trump, conditionnent l'approbation de l'aide financière américaine à des réformes migratoires strictes, mettant ainsi en péril les liens entre les deux nations. Certains élus républicains, ouvertement anti-Kiev, remettent en question la légitimité de l'aide, compromettant ainsi les fonds cruciaux pour l'Ukraine. En cas de réélection de Trump, des changements significatifs dans la diplomatie américaine pourraient avoir des répercussions sur la position des États-Unis dans le conflit ukrainien et leurs engagements internationaux. Le résultat des élections de novembre sera déterminant pour le destin de l'assistance américaine à l'Ukraine et pour l'équilibre des forces au sein du Congrès.
Alors que l'ombre de la guerre plane toujours sur l'Ukraine, deux années de conflit ont forgé des destins brisés, semé des terres dévastées, et ébranlé la conscience du monde. Dans cette tragédie continue, le président Vladimir Poutine, insensible aux désastres engendrés, persiste dans sa quête de pouvoir absolu. L'avenir de l'Ukraine demeure incertain, et le monde retient son souffle, témoin silencieux d'une épopée russo-ukrainienne dont les ramifications s'étendent bien au-delà des frontières tracées sur les cartes.
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